EN LORRAINE :

Dans le Nord de la Lorraine, la pomme de terre n'était cultivée que d'une manière marginale au XVIIIè. siècle. En 1761, le curé de Brainville écrivait : " On plante fort peu de pommes de terre, elles y réussissent peu, la terre étant trop forte. " La production de la pomme de terre se développa tout au long du XIXè. siècle, évitant à plusieurs occasions à la disette de faire des ravages dans une population affaiblie. Le maître d'école d'Hagéville pouvait affirmer en 1888 : " La pomme de terre est en hiver la principale nourriture du pauvre. " A Ugny, elle emplissait les caves en hiver, précieuse réserve pour les ruraux… et le cochon qu'ils élevaient. La pomme de terre prit sa place dans l'assolement triennal au point de faire pratiquement disparaître la jachère. On reconnaissait que cette plante sarclée entretenait le sol, l'ameublissait, le laissait propre. Près des usines, comme à Saulnes, tous les terrains libres étaient loués aux ouvriers pour y planter des pommes de terre. Les diverses phases culturales se firent longtemps à la main, hormis le ou les labours préparatoires qui pouvaient cependant être remplacés par le bêchage chez les plus humbles. A Ugny, en 1888, " le plantage, le piochage, le buttage et l'arrachage des pommes de terre ne se font plus à la main depuis nombre d'années. Le plantage et l'arrachage se font à la charrue ordinaire, le piochage avec la houe à cheval et le buttage avec le buttoir ".

Le Nord de la Meurthe-et-Moselle connaissait entre les deux guerres un mode de cuisson original, en liaison avec les fourneaux très particuliers qui y étaient répandus en grand nombre. A Baslieux, monsieur Jean Ney se souvient " des pommes de terre que sa grand-mère ou sa mère faisait cuire au sec, à même la fonte au-dessus du corps du fourneau dans le creux du couvercle : elles doraient d'une belle croûte et elles croustillaient sous la dent, parfois même un hareng saur grillait avec. "

A Affléville, coupées en deux et cuites sur le fourneau à calotte, on les appelait des " hosties ". Les habitants de Saint-Pancré préparaient le précieux tubercule de diverses manières : " là blanch toufail (pommes de terres cuites à l'étouffée, dans la graisse de lard fondue), " là toufail o noir càfè " (pommes de terres à l'étouffée arrosés de café noir),

" lé biskom " (pommes de terre rôties), " dé kronbir à frian tsu " (pommes de terre avec du lard grillé). On pouvait encore les cuire en robe des champs. Dans ce cas, elles étaient le complément du fromage blanc dans de nombreuses familles de l'Est.

D'après Daniel BONTEMPS, les gestes retrouvés (1995) et Au temps de la soupe au lard (1993) , Serpenoise.

 

 

 

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